J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

samedi 30 avril 2016

Où va le blanc de la neige...?

Seule au milieu de soi, dans la vaste étendue, elle poursuit le chemin. Elle l'a à plusieurs reprises emprunté et reconnaît là un arbre, ici un gros rocher qu'elle affectionne particulièrement, plus loin l'orée d'une forêt qu'elle nomme le petit bois et qui lui appartient en quelque sorte puisqu'elle est peut-être bien la seule à venir respirer là. Elle sait que la lumière changera lorsqu'elle posera le pied sur la mousse tapissant l'espace entre les troncs, mais elle ne craint rien car elle parle aux arbres et a la faiblesse de penser qu'ils lui répondent.
Elle pose sa main sur un des pins à l'écorce rugueuse, caresse sa peau, écoute ses silences, guette les rayons de lumière qui irisent les creux sombres, arpente les travées où elle aime entendre craquer son pas ou regarder plier les hauts fûts sous la volonté du vent, puis elle va s'asseoir à la lisière opposée, le dos appuyé sur un tronc, une pomme de pin entre les doigts ou une brindille qu'elle écorce jusqu'à l'aubier, et pose son regard sur les lointains dévoilés.

Là, toutes les questions d'infini s'immiscent en elle, épuisent les mots qu'elle sait. Elle n'est plus que regard pour ce monde qui l'interpelle , elle cherche des réponses dans les livres, mais ne trouve pas toujours le souffle qu'elle espère. Alors assise face au huis clos du paysage aimé, elle puise dans ce dialogue avec un horizon aux veines sombres saupoudré de frissons de lumière, toutes les couleurs qui devraient enluminer  ses jours.

Les étapes doivent être respectées : ne pas aller trop vite, prendre le temps de la contemplation et de la méditation avant de se laisser glisser un peu plus bas dans le pré, et de rester allongée dans le berceau de l'herbe, les yeux perdus dans les nuages  les nuages  qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages…. aussi blancs que le blanc de la neige où, elle le croit avec force,  les songes , lourds d'eau et d'air, se réfugient l'hiver et que, là, allongée sur cette terre, elle retrouve, s'épanouissant entre les talus bleus du ciel  . Regarder entre soi et soi, ces étincelles blanches, brûlantes comme une phrase ouverte qui traverse .

(Texte écrit pour la consigne 388 de Kaléidoplumes)
Si vous cliquez ci-dessous, vous aurez le texte murmuré dans le creux de votre oreille....


9 commentaires:

Patrick Lucas a dit…

ç'est ça
précisément
prendre le temps de la contemplation
là où s'épuise le blanc de la neige

Estourelle a dit…

Sensass !!!

cassy a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
cassy a dit…

Oups, j'ai supprimé le com précédent (j'avais fais une petite faute )
Excellente idée de mettre ce texte en audio, cela lui donne encore plus de force et j'ai ainsi le plaisir d'entendre ta voix :)
Bravo Bruyère, enfin jardin d'ombre, enfin Laura quoi !

Ange-gabrielle a dit…

C'est trop de plaisir de t'entendre murmurer ce beau texte, ici dans cette vieille maison où le feu ronronne et je sens bien avec ces petits 12° que le blanc de la neige n'est pas très loin caché, dans un creux des Trois Becs

mémoire du silence a dit…

Merci infiniment, c'est magnifique, vos mots à la fois reçus dans l'oeil et dans l'oreille ... votre texte lu devient chair..
merci infiniment.

mémoire du silence a dit…

https://vimeo.com/83591907

Laura-Solange a dit…

Merci à tous! j'irai voir la vidéo!

Marty a dit…

les mots chantent et on sent dans l'âme tout ce que la terre amasse en secret