J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

vendredi 16 mai 2025

Divagations/ 27 / Les mots blancs/ 6

 

 


Le fil. Celui qui se déroule sur les tableaux de Safet Zec découverts un soir de fatigue à Venise. Furetant dans mon stock de photos sur l’ordinateur, je m’arrête sur celles de l’année 2017, et retrouve très vite toutes celles que j’ai captées des peintures exposées dans l’église Santa Maria della Pietà, sous le terme Exodus, réalisés par le peintre serbo-croate Safet Zec. Je me souviens de ma sidération face à toutes ces œuvres qui m’encerclaient. J’étais entrée là sans savoir ce qui m’attendait. La foule dehors au bord du Canal di San Marco, la chaleur, la fatigue après des heures de marche dans la ville, et cette église avec l’affiche d’une expo en entrée libre. La découverte, pas à pas, de ce qui se donnait à voir et il m’a fallu un peu de temps pour comprendre l’ampleur de ce qui se tenait là sous mes yeux, tous ces corps vêtus de blanc, se serrant les uns contre les autres dans le naufrage de leurs vies, et ce fil rouge traversant tous les tableaux gigantesques qui me toisaient. Je ne vois plus que lui, ce fil comme un ruisseau de lait qui fuit – écriture de sang torsadée qui s’enroule autour des corps étendus de la plante du pied aux manches ou la taille d’un enfant – fil rouge qui relie, accroche le regard de celui qui, hébété, se tient face à ces corps qui enserrent d’autres corps ceux des enfants qu’il faut protéger, rassurer, bercer, revêtus du blanc de l’humanité dans son devenir. Le sillon rouge ruisselle de ce sang de toutes les plaies et s’imprime dans la mémoire. Ne pas lâcher mon fil rouge, celui qui me relie à la petite fille d’il y a si longtemps, ne pas emprunter les chemins qui ne sont pas les miens mais ceux que l’on a voulu me faire prendre, et laisser fulgurer cette langue de vertige.


mercredi 14 mai 2025

Quatrain/ 168

 

ouvrir les yeux

derrière le rideau des ombres

des peines et des sourires

soudain Proust

lundi 12 mai 2025

Ricochets/ Année 2/ Semaine 19

 


1/ Un oiseau au petit matin. Sa psalmodie sous un ciel gris du gris des jours tristes. On voudrait croire qu'il chante pour soi. Que quelque chose à entendre se murmure là entre les branches encore humides de la nuit. Mais on ne sait pas traduire sa mélodie. On sait juste que ce matin, il y a du bien-être à l'écouter. Il aide à sortir des songes dans la douceur matinale.

2/ Quelque chose à ne pas oublier: le frémissement de l'herbe, un peu haute, caressée par le vent du nord. Avoir la sensation d'être vivant. S'obstiner à l'être, à le rester. Laisser faire tout le reste. Frissonner avec les brins d'herbe. Devenir brin d'herbe de la terre du vent. Se laisser porter. Ne rien espérer d'autre que le vent, être herbe au milieu des autres. Et laisser faire le vent.

3/ Écrire hier sur un absent, mais un absent non rencontré dans la vie. Un proche qui n'a jamais pu l'être puisque disparu avant de me connaître. L'absence comme un aiguillon de création. Un manque. Une strate blanche dans toutes celles qui nous constituent. Un peu écrue malgré tout par les images qui se sont constituées et qui ont occupé la place de l'absent. De quoi écrire avec sérénité et plaisir.

4/ Se dire qu'il est temps, qu'il ne reste plus beaucoup d'années devant soi, pour réaliser, mener à bout tous les projets d'écriture qui sommeillent, se réveillent de temps à autre, s'assoupissent à nouveau au fond d'un tiroir. En faire la liste. Elle est longue. Plus une seconde à perdre. Aller au terme de chacun d'entre eux, voilà la difficulté mais aussi une raison de vivre, un équilibre à rechercher, à trouver.

5/ Comme les morceaux épars d'un monde dont on pensait qu'il n'existait plus. Réajuster les fragments. Une certaine lumière semble frémissante. Une lumière qui se voudrait téméraire. Engouement passager face à un être nouveau qui éveille des espérances. mais que peut un homme face à la folie des hommes. Les mots de paix ne peuvent guère amadouer les maîtres du monde. Construire des ponts semble être le mot-clé pour y parvenir.

6/ Comment saisir le moment où une métamorphose, même la plus infime est en train de se produire en soi? Que dans l'après de ce moment, on n'est plus tout à fait la même personne. Comment insensiblement on devient dans son esprit quelqu'un de différent, dont sans doute personne ne prend réellement conscience, enfermé que l'on est pour les autres dans un personnage immuable. Allumer une loupiote au-dessus de sa tête...

7/ Bribes de savoir dont on poursuit l'accumulation tout au long de sa vie comme une manière de repousser les jours où plus rien ne pénétrera l'esprit. Mais il faut faire de la place aussi alors d'autres choses doivent s'effacer pour laisser entrer de nouveaux éléments, de nouvelles ressources. Apprendre encore et encore comme pour intensifier une vie très ordinaire, lui donner le relief nécessaire par la connaissance et la sensibilité.

samedi 10 mai 2025

Journal d'un écrivain/ 10

 

Dimanche 16 février 1930:

 J'ai dû rester étendue sur un sofa pendant toute une semaine. Aujourd'hui, je me relève dans mon état habituel; entrain et lassitude tour à tour, avec des envies d'écrire spasmodiques, puis des somnolences.(...) Mais je ne crois pas que je puisse écrire très efficacement. Un nuage tourne dans ma tête. Je suis trop consciente de mon corps et trop projetée en dehors de mon ornière vitale pour revenir au roman. Une ou deux fois j'ai senti dans ma tête cette bizarre palpitation d'ailes qui me vient si souvent quand je suis malade.(...) Si je pouvais rester au lit encore une quinzaine (mais il y a peu de chance que j'y parvienne), je crois que je pourrais voir Les Vagues dans leur ensemble. À moins que, c'est encore possible, je ne parte dans une tout autre direction. (...) Je crois qu'en ce qui me concerne, ces maladies sont — comment dire — en partie mystiques. Il arrive quelque chose à mon cerveau. Il refuse de continuer à enregistrer des impressions. Il se ferme. Il devient chrysalide. Je reste étendue complètement inerte, souffrant parfois de douleurs physiques aiguës ou de simples malaises. Et puis brusquement un ressort se détend. (...) ( Je passe mon temps à mettre sur pied la scène d'Hampton Court, dans Les Vagues. Dieu ! Je n'arrête pas de me demander si j'arriverai à venir à bout de ce livre. Pour le moment, c'est un fatras de fragments.)

Virginia Woolf Journal d'un écrivain ( traduit par Germaine Beaumont)

jeudi 8 mai 2025

Divagations /26 / Les mots blancs /5


 

La sonnerie du téléphone retentit, on voudrait ne pas répondre, mais le nom qui s’affiche est reconnu, alors on glisse le doigt de la gauche vers la droite sur l’écran et on répond. Si l’interlocuteur dit je ne te dérange pas, on s’entend répondre non, tout va bien, alors que dans la réalité, bien sûr qu’il me dérange, qu’il me fait revenir dans le monde où je n’étais plus, et que si la conversation dure un peu, je n’aurai plus l’énergie ou le désir de revenir à l’écriture. La patience ou la volonté se construisent au fil du temps, mais peuvent aussi être anéanties en quelques secondes, parce que le mental ne suit pas. Je vais peut-être tout laisser tomber, refermer l’écran d’ordinateur et me perdre, fuir dans une activité qui elle, est sûrement utile. Écrivant ces mots, je sens même la pensée de l’à quoi bon remonter à la surface, envahir mes neurones et me voilà prête à tout envoyer à la poubelle, à repousser l’ordinateur ou à surfer sur les pages variées et chronophages d’internet, à fuir ce qui est en train de s’écrire. Et tiens, je vais aller me préparer une tasse de thé, profiter de mon passage en cuisine, pour laver la vaisselle sale qui patiente dans l’évier, donner un coup de balai, passer une éponge sur le plan de travail, aérer la chambre aussi car j’ai oublié, faire le lit… Je pose la tasse de thé sur le bureau, il est un peu chaud, fixe l’écran d’ordinateur, relis ce que mes doigts ont tapé et inscrit, me dis que c’est pas si mal finalement, que peut-être je tiens quelque chose d’intéressant, ou tout au moins qui m’intéresse, qu’il faudra relire demain, je corrige quelques fautes de frappe, rajoute une virgule, note sur un carnet tout près ce qu’il faudrait creuser, mettre au clair. Mais là je ne peux rien de plus, je me suis extraite de la matière des mots, j’ai lâché le fil qui les relie entre eux, avec moi.

Je suis ainsi faite que rien n’est réel si je ne l’écris.*

 

* Cité par Quentin Bell dans Virginia Woolf Biographie t2

mardi 6 mai 2025

Ricochets/ Année 2 / Semaine 18

 


1/ L'escarpement du jour. Les pieds encore bien posés sur le socle de la terre. En avant de soi continuer le chemin. Pierres immobiles. Le pas ne s'est pas approché. Et si le souffle venait à manquer. Il y a comme un mur devant. Envie de se tenir dans cet écart. Ne pas avancer. Rester dans la marge du jour. Hors de la main. Laisser place à un peu de soi.

2/ Le bourgeonnement du doute s'insinue sur le bas-côté des chemins. Il jaillit dans un creux, se colore de tonalités variées, s'agite sous la brise matinale. Comme des grains de soleil semés ça et là par une main espiègle. On n'oublie pas ce que l'on voit. On avance sur du sable mouvant où chaque pas est une question. On avance, malgré. On ne peut être que ce que l'on est .

3/ Cette impression durable de marcher à côté de soi. Une concentration difficile. L'envie de demeurer à l'intérieur des quatre murs de la maison. Se tenir derrière le rideau de feuilles des bouleaux et des buissons denses du jardin. Derrière une géométrie mouvante de branches traçant des diagonales de vert jusqu'au bleu du ciel. Dans ma petite boîte noire. Parcourir un atlas intérieur, une cartographie de linéaments souterrains. Et rien d'autre.

4/ Jour d'éclat. Même les échardes éclairent. Dans les interstices de l'air. Traduire ce qui dehors agite le dedans. Le ventre blanc de l'hirondelle, la complainte du merle, la touffeur du lilas. Et le vent dans la langue à contre-sens. L'air qui se bloque soudain, fait un arrêt sur image. Le sable entre les doigts s'écoule. Mais de château point. Et le travers des mots que les yeux écorchent sans savoir.

5/ Pour faire d'une journée banale une journée réussie, il faut une belle lumière, un lilas en fusion, un ciel drainé de bleu, parcouru de petits nuages, quelques chants d'oiseaux mélodieux, de l'eau fraîche, quelques carrés de chocolat, marcher sur des chemins aimés ouvrant sur le beaux paysages, une petite brise qui caresse la joue, quelques amis avec qui échanger, évoquer nos souvenirs dans nos mots qui palpitent comme une joie.

6/ Se tenir sur une crête. On ne peut y rester. Se tapir entre les pétales d'une fleur, dans une grappe de lilas pourpre. S'enivrer, se cacher, se perdre pourquoi pas. Savourer la solitude veloutée, à son insu. Il faudra se consoler de leur absence. Rien ne dure. Reprendre l'errance ensuite, le souvenir des instants embaumés caché dans les boucles des cheveux et qui s'agitent au bout des doigts, se posent.

7/ Vivre par à-coups. Ne jamais savoir de quoi sera fait le lendemain. Envol brusque ou arrêt au-dessus du vide. Des pensées traversent, s'installent, résident dont on n'est pas maître. L'équilibre est une chose difficile à réaliser. Il y a toujours un soi à l'arrière de soi, bien dissimulé sous ses voiles, qui se répand en murmures. Accrocher le regard aux sentinelles qui balisent le chemin. Heureusement les livres sont là.

dimanche 4 mai 2025

Colline

 

Quatre maisons fleuries d’orchis jusque sous les tuiles émergent de blés drus et hauts.

C’est entre les collines, là où la chair de la terre se plie en bourrelets gras.

Le sainfoin fleuri saigne dessous les oliviers. Les avettes dansent autour des bouleaux gluants de sève douce.

Le surplus d’une fontaine chante en deux sources. Elles tombent du roc et le vent les éparpille. Elles pantèlent sous l’herbe, puis s’unissent et coulent ensemble sur un lit de jonc.

Le vent bourdonne dans les platanes.

Ce sont les Bastides Blanches.

Un débris de hameau, à mi-chemin entre la plaine où ronfle la vie tumultueuse des batteuses à vapeur et le grand désert lavandier, le pays du vent, à l’ombre froide des monts de Lure.

La terre du vent.

La terre aussi de la sauvagine : la couleuvre émerge de la touffe d’aspic, l’esquirol, à l’abri de sa queue en panache, court, un gland dans la main ; la belette darde son museau dans le vent ; une goutte de sang brille au bout de sa moustache ; le renard lit dans l’herbe l’itinéraire des perdrix.

La laie gronde sous les genévriers ; les sangliots, la bouche pleine de lait, pointent l’oreille vers les grands arbres qui gesticulent.

Puis le vent dépasse les arbres, le silence apaise les feuillages, du museau grognon ils cherchent les tétines.

Jean Giono "Colline"

vendredi 2 mai 2025

Journal d'un écrivain/ 9

 

Dimanche 26 janvier 1930:

Les Vagues ne se vendront pas à plus de deux mille exemplaires*. Je suis prise à ce livre. Je veux dire que j'y suis engluée comme une mouche à du papier collant. Il m'arrive de perdre le contact, mais je continue quand même, et de nouveau je sens que je suis parvenue à force de volonté et d'audace — comme lorsqu'on fonce à travers les ajoncs — à empoigner le cœur du sujet. Peut-être puis-je maintenant dire les choses directement et tout au long, sans qu'il soit nécessaire de jeter continuellement ma ligne pour donner à mon livre la forme qui lui convient. Mais comment le former, l'accorder, lui donner son unité? Je n'en sais rien, pas plus que je ne sais encore ce que sera la fin: peut-être une gigantesque conversation. Les intermèdes sont très difficiles, et cependant essentiels pour jeter des ponts et fournir une toile de fond: la mer, la nature insensible, que sais-je ? Mais je crois, lorsque je suis emportée dans ce mouvement, que j'ai raison. En tout cas pour l'instant, toute autre forme romanesque ressemble à une répétition.

* 31 octobre 1931, 6500 exemplaires des Vagues, vendus en trois semaines. Mais la vente va s'arrêter maintenant, je suppose ( Note de V W)

Virginia Woolf " Journal d'un écrivain" traduction de Germaine Beaumont



mercredi 30 avril 2025

Divagations / 25 / Les mots blancs / 4

 

Se poser soudain la question de ce qui est premier : le geste de tracer les mots ( stylo ou clavier), ou la pensée qui va se déposer… Pour écrire il faut poser le premier mot — blanc encore — et laisser s’enclencher un déferlement de ce qui fera phrase, puis fragment de quelque chose et texte si tout va bien. Ce qui se détache de l’obscur, dans ce paysage de nuit, dont on ne savait rien, se met à se délivrer, s’animer, trouver une existence. Quelque chose fait halte et s’inscrit à petits pas dans le sable. Et tout est si fragile, si faible, et peut être effacé en quelques secondes. Je reprends de l’énergie dans le souvenir de la fillette, assise à son petit bureau dans la cuisine de là-bas, celle de l’enfance, et par une étrange juxtaposition du temps, je réalise qu’elle était exactement dans la même configuration physique et spatiale qu’aujourd’hui : face à un mur, une demi-cloison pour être exacte qui ne montait pas jusqu’au plafond mais permettait juste une séparation entre ce qu’on nommerait alcôve et la cuisine. Face à ce bureau recouvert d’un placage entre orange et marron, du formica sans doute, une étagère, une simple planche bricolée par mon père où étaient amassés mes trésors d’alors et les quelques livres utiles pour l’école et ceux qui m’avaient été offerts, retenus par des serre-livres en bois en forme d’éléphant. À ma droite une fenêtre très haute, qui était juste plus près du ciel que dans mon bureau actuel, car l’appartement où nous vivions était au troisième étage, et j’ai le souvenir d’hirondelles qui traversaient alors l’azur et leur trissement, mot que je ne connaissais pas, mais qu’aujourd’hui j’éprouve un réel plaisir à écrire. Sur ma gauche, le petit placard vert, comme l’étagère, où je rangeais ce qui m’était personnel, dessins, livres, cahiers, jouets, tout comme aujourd’hui le meuble à quatre tiroirs, sur ma gauche également, dans lequel reposent cahiers, carnets, stylos, dossiers … Je me souviens bien avoir tenté de mettre ce meuble à tiroirs et sur roulettes sur ma droite mais il y avait quelque chose dans cette disposition qui ne me convenait pas. Je comprends mieux pourquoi à l’instant. Je me revois mâchouillant mon crayon ou stylo, les yeux levés vers le plafond en attendant que descende l’inspiration, comme je croyais que cela se faisait, avant de poser mes premiers mots dans un carnet rouge où je m’essayais à jouer à Victor Hugo, ou plus simplement à faire comme mon père qui noircissait, de sa belle écriture penchée, des cahiers ou carnets sur son bureau dans la chambre. Je prends conscience de cette configuration similaire avec étonnement et aussi plaisir: la petite fille que j’étais n’a pas totalement disparu.


lundi 28 avril 2025

Ricochets/ Année 2/ Semaine/ 17

 


1/ Les premiers coquelicots de l'année ont illuminé mon regard. Deux ou trois vifs et fiers sur un talus au bord de la route où la voiture roulait, je n'étais même pas sûre d'avoir bien vu. Un peu plus loin une petite touffe encore, les pétales rouges traversés par le vent. Coups de cœur. La lumière du jour dans cette espérance, dans ces taches d'émotion dont on ne sait plus rien.

2/ J'aime les terres. Les grises de granite, les blanches de calcaire, et d'autres encore ocres rouges clairs ou plus sombres. J'aime la glaise où s'enfonce le pied. J'aime les pierres qui roulent sous mon pas et la phonolite qui me renvoie une réponse. J'aime l'arène granitique qui crisse sous le talon. Les terres sont une mémoire et fertilité. Parfois je subtilise une pierre comme un cadeau à moi seule offert.

3/ Au bout de l'œil il y a ce qui veut bien s'accrocher: le faîte d'un arbre – olivier pour ce jour – , des oreillers de nuages, le bleu d'un ciel différent de mon ciel coutumier, et l'invisible du je. Derrière les lèvres, les syllabes s'emmêlent, les mots s'échappent. Les cloches d'une église toute proche donnent le temps qu'il est. Le jour a encore de bons moments devant lui. Tout va bien.

4/ Les petits évènements qui jalonnent le cours du jour, une petite fille qui cherche à attraper un pigeon, une autre qui savoure une glace, un regard dans un tableau qui vous happe — et pourquoi celui-ci au milieu des centaines de tableaux qui habillent ce musée. Des détails qui restent en mémoire, qui donnent du volume à ce qui s'est vécu, du relief, des gros plans sur un jour presque ordinaire.

5/ Une éclosion d'hirondelles comme un battement de ciel au-dessus de soi. Un envol neuf de pensées toujours en lien avec l'enfance. On ne se refait pas. Le monde ne change pas tant que cela. Fleur de sel des souvenirs. Comme ouvrir l'envers d'un chemin, un cratère de lumière: des hirondelles, des coquelicots, des résidus d'enfance. Écorçage d'une vie antérieure, de ces silences qui sinuent au sein même des infimes murmures.

6/ Des volets en bois bien fermés. Des portes de silence. Des murs enserrant l'inhabité. Des maisons hermétiquement closes. Des villages presque oubliés dans cet abandon. Des lieux traversés autrefois qui ne se ressemblent plus. Et sommes-nous des fantômes revenant hanter ce qui fut ? Et ce n'est pourtant pas si loin dans le temps.... On entendrait presque encore les conversations, les murmures. Un pan de lierre remue sur un mur.

7/ Mieux vaudrait sortir et s'abreuver aux effluves d'un printemps plein de volupté. Mais c'est le dedans qui me happe et cette nécessité de reprendre ses marques en soi. Prendre le temps des petits riens: ranger les stylos, déplacer un ou deux documents, ouvrir un livre, feuilleter une revue, prendre connaissance de messages, jeter ce qui n'a pas d'importance, écrire quelques notes. Remettre les pieds dans sa vie, dans un rythme nécessaire.

samedi 26 avril 2025

Quatrain/ 167

 

ce qui s'insinue

d'une autre voix

et rafraîchit les yeux

un peu de ciel dans le sable

jeudi 24 avril 2025

Pertuis /1/ 2 / 3

Voici les 3 reproductions de tableaux de Georges Rouault qui ont déclenché un texte en écho dans Pertuis1 / 2 / 3