1/ Toutes ces paroles qui fusent, s’échangent, déstabilisent, remuent comme autant de courants d’air, puis s’échappent, se perdent, meurent aussitôt mises au monde, oubliées de presque tous. Choisir ses mots, les élever au rang de pépites, les rendre rares, n’en délivrer que le nécessaire pour un quotidien serein. Et laisser des ruisseaux de silence abreuver l’entre-deux des échanges. En quoi le silence fait-il si peur qu’il est rompu en permanence ?
2/ Dans l’épais brouillard de la vie ordinaire, tenter de se diriger, d’éviter les écueils sur le chemin, d’avancer pas à pas entre les ombres. S’accrocher quelques instants aux ailes d’un oiseau venu se reposer sur le muret de l’autre côté de la baie vitrée. Un rouge-gorge esseulé. Lâcher prise, rêver avec lui dans la fluidité de l’instant. Un peu de douceur et de couleur partagées. La manne de ce jour.
3/ Prendre le temps des attentions données aux particules de vie disséminées dans les interstices des jours. Ce sont elles qui permettent à l’esprit de ne pas vaciller, de reprendre souffle. Les mettre en mots, se les transmettre par le liseré de l’écriture est une manière d’espérer encore de soi, de la vie. L’incertitude face à ce qui se dessine donne à ce qui s’écrit des voies aléatoires, des possibilités d’îles.
4/ On parcourt des textes que l’on a écrits il y a longtemps et dont on n’a même plus aucun souvenir. On a la faiblesse de les trouver plutôt bien écrits, semblables à une vieille étoffe qui aurait conservé toute sa douceur sans avoir eue à subir le passage des mites. On se dit que l’on écrit moins bien maintenant. On se demande bien s’il reste quelque chose à espérer désormais.
5/ Avoir l’impression de se promener entre les ruines d’une ville que l’on a arpentée si souvent et que l’on reconnaît à peine, attristée qu’elle est avec tant de devantures fermées, affublées d’une pancarte à vendre ou à louer et dont personne apparemment ne veut. On déambule par habitude en se remémorant ce qui fut, et on imagine ce qui pourrait être. Par chance les librairies sont encore nombreuses !
6/ Chacun garde quelque chose et cultive certains traits d’une personne qu'il a connue et qui désormais n’est plus. Et forcément nos souvenirs et nos ressentis sont différents, selon qui l’on est. Sans doute personne n’a raison. La complexité de l’être humain fait qu’il se décline selon la personne qui le regarde avec le souvenir de son propre cheminement à ses côtés. L’essentiel doit être ce qu’il a semé en soi.
7/Se tenir sur un seuil, longtemps, parfois des années durant, c’est malgré tout être là. Et on voit d’autres gens au-delà de leurs propres seuils Aux entours de ces orées où se tenir, des espaces aux variations de verts, plus ou moins intenses, tendres ou brillants, des bleus aussi qui mûrissent et s’épanchent avec douceur. On maintient son séjour dans l’écart où l’on continue à tenir le fil de soi.
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