J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mardi 9 juin 2020

La voix endémique



Je nomme “la voix endémique” mais je ne sais pas ce qu’elle est. Je découvre comment deux mots choisis, assemblés dans l’instinct d’un instant peuvent faire faille, passage d’où s’échappe l’indéfini. Ce qui  vient prend forme incessamment nouvelle.
  La voix n'assène pas, cela je le sais. Elle n'est pas mots d'ordre. À vouloir l'attraper, il n'en reste plus rien comme ces nuages de fumée que les enfants s'amusent à essayer de retenir dans leurs mains. Cette voix, que j'espère interroger à la mesure de son exigence, est dissipation, disparition. Dans le même temps, terre pour moi, vocable où vivre. Je pense à "la colonne absente" sur quoi s'est bâti le poète*.
 (...)
 Quand la voix se suspend, le silence qui suit fait grandir un jardin : les mots poussent alors follement (chaos de floraisons jaillies en formes, nuances, couleurs nouvelles, naissances spontanées, multiples, épanouies en velours et épines). Les mots du poème ne se referment jamais.  

Benoît Reiss: La voix endémique ( Éditions Maintien de la Reine 2020)

1 commentaire:

Estourelle a dit…

"deux mots peuvent faire faille
les mots du poème ne se referment jamais
le silence qu suit fait grandir un jardin"

yé yé yé (ce qui veut dire oui oui oui)!!!