1/ Des bulbes sont là, nourris du silence et de la dormance de l'hiver, noués de trames invisibles, tout près à s'extraire du terreau où ils sommeillent. De l'air, de la sève, des couleurs en attente. À contempler les végétaux se cultive la patience. Et même si le temps se fait peau de chagrin, et semble filer entre les doigts beaucoup plus vite qu'avant, faisons de la patience une alliée sereine.
2/ Tout ce qui, sans faire de bruit, se déplie dans ce qui se dit ou s'écrit, ou dans des gestes, un regard, une attitude: l'implicite. Ce qui n'a pas besoin d'être énoncé. Du latin implicitus issu du verbe implicare qui signifie envelopper. Dissimulé dans les replis d'une écriture, dont on laisse au lecteur une tache à accomplir et s'immiscer dans les arcanes du flou et y dénicher malgré tout l'implicite.
3/ La mélodie d'India song comme çà qui se murmure, se répète en tête, qui résonne longtemps, me décale du réel. On se dit qu'on aimerait bien la jouer au piano. Mais on se souvient que l'on ne sait pas jouer du piano. Mais que, si on savait, et que peut-être tout est possible, c'est cela que l'on jouerait aujourd'hui. Rechercher la partition, rêver devant, comme face à un envol d'oiseaux.
4/ Le temps de revenir à soi, de laisser de côté les soucis des uns et des autres. Tant d'années sans posséder cette richesse là, ce temps béni à soi consacré...Cela se vit comme un printemps au plein cœur de l'hiver. Cela est précieux comme un long ruban de brume qui flotte au dessus d'un vallon où les rayons de soleil font briller des étoiles. Comme l'odeur d'une boulangerie porte ouverte.
5/ À la lisière de ce monde. Ne pouvoir que se tenir là. Dans la marge. Continuer de lire ce qui m'importe et porte la pensée, malgré tout. S'éloigner du reste, du superficiel, de l'évènementiel, du tout ce qui occupe l'espace. Se rassembler dans les replis de soi. C'est comme une fuite. Se découper des carrés de lumière où prendre vie, où pouvoir résister, feuilleter les regards posés sur le monde.
6/ Comment encore chanter dans les débris des mondes où, fatigués, désabusés, il nous faut continuer à avancer ? Alors les éclats de rire de la fillette, sa volonté de connaître, d'apprendre, de tenter de nouveaux mots, de mettre en mouvement sa pensée, la joie qu'elle éprouve devant d'infimes choses que l'on ne voit plus. Rester là à la regarder et éclater de rire avec elle et s'émerveiller devant une fleur.
7/ À travers le viseur de l'appareil, il y a le cadrage d'une photo. On cherche à conserver un réel que l'on croit voir. Puis on appuie sur le bouton qui crée la vision mentale. Plus tard, on pénètre dans sa photo, on recadre encore, on voit ce qui n'avait pas été vu, ou on voit autre chose que ce qui avait nécessité l'envie de déclencher. L'écriture a une démarche analogue.
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