Dimanche 16 février 1930:
J'ai dû rester étendue sur un sofa pendant toute une semaine. Aujourd'hui, je me relève dans mon état habituel; entrain et lassitude tour à tour, avec des envies d'écrire spasmodiques, puis des somnolences.(...) Mais je ne crois pas que je puisse écrire très efficacement. Un nuage tourne dans ma tête. Je suis trop consciente de mon corps et trop projetée en dehors de mon ornière vitale pour revenir au roman. Une ou deux fois j'ai senti dans ma tête cette bizarre palpitation d'ailes qui me vient si souvent quand je suis malade.(...) Si je pouvais rester au lit encore une quinzaine (mais il y a peu de chance que j'y parvienne), je crois que je pourrais voir Les Vagues dans leur ensemble. À moins que, c'est encore possible, je ne parte dans une tout autre direction. (...) Je crois qu'en ce qui me concerne, ces maladies sont — comment dire — en partie mystiques. Il arrive quelque chose à mon cerveau. Il refuse de continuer à enregistrer des impressions. Il se ferme. Il devient chrysalide. Je reste étendue complètement inerte, souffrant parfois de douleurs physiques aiguës ou de simples malaises. Et puis brusquement un ressort se détend. (...) ( Je passe mon temps à mettre sur pied la scène d'Hampton Court, dans Les Vagues. Dieu ! Je n'arrête pas de me demander si j'arriverai à venir à bout de ce livre. Pour le moment, c'est un fatras de fragments.)
Virginia Woolf Journal d'un écrivain ( traduit par Germaine Beaumont)
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