J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

vendredi 19 octobre 2012

Brumes


En lisière des jours, d'aubes en crépuscules, les brumes tissées de silence se coulent, s'enroulent, parcourues de frissons blancs, froissées, provisoires.

Elles montent de la terre. Ou les eaux les ont suées, et elles suivent leurs cours, vaguement rassemblées. Elles voyagent, immobiles dans la fraîcheur de l'air, elles ne seront pas saisies, elles n'appartiendront pas, ne seront pas étreintes. Elles glissent, irisées d'un soleil pâle qui les boit ou lentement enfoncées dans la nuit.

Elles ne sont pas le brouillard, ne se confondent pas avec lui, ne se fondent pas en lui. Elles seraient une occupation de l'air, une distraction, une émanation, un songe ancien noué au coin de la mémoire, une pincée de ciel envolée.

Les brumes ont goût de solitude, âcre et lisse, grave en bouche comme un vin choisi. Elles flottent entre les lignes tues, et leur caresse s'effiloche à la corne du bois, de l'autre côté du monde connu, loin.

Marie-Hélène Lafon " Album" ( Buchet Chastel)


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