J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

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samedi 6 septembre 2025

Choses incertaines à laisser décanter

 


( l’uniforme gris du ciel pèse un peu)

face à ce ciel de tension --- se réfugier dans ce qui fait être — ce qui ouvre le regard — ces mots blancs comme les cailloux ramassés en bord de mer* — comme ces grappes de lichens sur les troncs d’arbres — où circule entre les thalles — un air de rien — un canevas nébuleux — qui cherche à se dire — avec le déhanchement des doigts sur le clavier — dans une évidence — ou une forme de désarroi — les yeux vides ou blancs — ne savent plus très bien — ils sont au bord — au seuil de l’image à venir — 

*Virginia Woolf 

 

jeudi 28 août 2025

Choses qui s'éclairent

 

( se frayer un regard dans un dehors bien brouillé)

pensées qui ne se posent sur rien — mais ne se reposent pas pour autant — cela tourbillonne et fuse — on voudrait presque n’avoir rien en tête — juste arriver à canaliser ce flot — à ordonner ce qui surgit — à insérer un peu de silence entre — à en accueillir une seule — et la chérir — faire en sorte de l’habiter — ou de se laisser habiter par elle — soudain dehors la brume se dénoue — la lumière trace un sillon entre les arbres — mettre ses pas dedans — se saisir des instants les uns après les autres — 

(recyclage d'un texte posté sur mon blog Aux marges du jardin appartenant à la rubrique Carnet)

dimanche 24 août 2025

Survie

 





 Des livres, des livres encore des livres qui s’amoncellent sur le bureau, les étagères, au sol, sur les fauteuils, dans chaque pièce de la maison, au sous-sol, entre les tempes, dans les songes... Combien de pages lues, de kilomètres de phrases parcourus, de mots déchiffrés, de pensées effleurées, de questions, de réponses, de visions d’un monde données, d’évasion apportée, de sourires, de larmes, d’apaisement, de remises en question, de découvertes… Au bord de soi, rechercher encore et encore ce vertige d’hésiter sur les étals des librairies, de tourner les pages et d’acheter ce livre qui semble indispensable à la survie.

dimanche 2 juin 2024

Jalousie des mots/ 21

 


Combien d'essais sont nécessaires pour faire germer ce que l'on pressent avoir à déposer de cet inconnu que l'on porte en soi? Avant, c'est le moment du chaos, ce moment flou où l'on se dit que l'on ferait mieux d'aller arracher les mauvaises herbes dans l'allée, ou entreprendre le grand nettoyage de la maison, ou de préparer un repas agréable. Mais on s'obstine à se tenir dans ce courant sourd du bruit des mots, dans une espérance, même si on a bien pris la mesure des difficultés et que l'on souhaite que des ailes viennent nous pousser dans le dos.

dimanche 26 mai 2024

Jalousie des mots /20

 


La langue de la fiction s'immisce entre les lignes, repoussant les affres de la mort dans les recoins d'un autre jour, un autre temps, rien ne presse. L'envie d'aller plus loin, ailleurs, découvrir d'autres contrées, d'autres temps, d'entendre l'appel qui encore et toujours résonne au fond de soi, se faisant l'écho des coups de tonnerre qui éclatent au plein cœur de l'orage réveillant les esprits paresseux. Déboulonner la statue que l'on se plait à représenter pour les autres: mère, épouse, grand-mère, sœr, amie fidèle, pour d'autres encore celle qui guide sur des chemins d'écriture insoupçonnés. Mais tout n'est qu'une illusion.

samedi 18 mai 2024

Jalousie des mots / 19

 


Bribes de la journée qui restent en tête, qui ont fait sourire au moment même où cela se passait, des petits détails qui auraient mérité une photo mais voilà, on poursuit le chemin et l'on passe à autre chose. Tout est ainsi que la fuite des nuages dans l'atmosphère, ils semblent faire la fête, puis plus rien ne bouge, les pensées s'enfuient vers un ailleurs tout aussi provisoire, puis s'égarent sans le savoir et n'arrivent plus à revivifier cet instant si particulier. Comme le mot sur le bout de la langue qui s'est absenté et nous laisse quelque peu pantois..

dimanche 12 mai 2024

Jalousie des mots/ 18

 


À la lisière de l'instant, lorsque tout semble encore possible, que les lointains ne se sont pas encore évaporés et que l'intensité du jour est en pleine puissance, penser que l'illumination est en chemin, peut-être même une révélation pourrait advenir. De tous côtés la vie est devant, nous faisant face, avec ses coïncidences qui se déclinent comme des gouttes de pluie sur de la tôle ondulée, mais que l'on ne sait plus repérer. La vie à travers et au bord, pleine de simplicité, comme celle des enfants qui vous regardent, vous sourient et vous entraînent dans leur univers de joie.

samedi 4 mai 2024

Jalousie des mots/ 17

 


Face au paysage dont l'immensité se plaît à fomenter nos songes, où l'intime et l'infime s'entrelacent, devant un monde dont nous sommes soudain à la fois en dehors et au plus profond de soi, l'inclinaison des pensées nous porte vers une méditation calme dépourvue d'ennui. La fenêtre ainsi élargie de notre esprit permet ces résonances dont on éprouve la nécessité pour se tenir droit sur son chemin de vie. Dans la contemplation de cet ailleurs, le regard s'accroche, comme le lichen sur la pierre, et ne peut se détacher de cette immensité dont nous savons qu'elle fait partie de soi.



dimanche 28 avril 2024

Jalousie des mots / 16

 


Le pierrier sous les pas qui s'arriment à la texture, les yeux se fixant sur les inégalités des roches qui pointent, roulent, déséquilibrent juste ce qu'il faut pour rappeler à l'ordre. Le vertige, on le sait, à tout moment peut survenir, brouillant la vision, rendant toute progression difficile, accélérant les battements de cœur, l'ivresse se glissant dans le pas, et les pensées n'étant plus sous contrôle. Dans l'oubli du réel, au seuil d'un vide qui aspire, un ailleurs d'immensité contre lequel il n'est pas possible de lutter, car on a aucune chance de vaincre l'impact de ce coup de foudre.

samedi 20 avril 2024

Jalousie des mots/ 15

 


Strates d’oublis et de pertes dans la futilité du temps qui fuit. Lettres envoyées dont on ne sait plus rien (ni ce qui était écrit, ni comment elles ont été accueillies), lettres reçues et oubliées, tassées dans un carton à chaussures dormant sur quelque étagère. Pensées, issues de mythes, que l’on trouvait géniales et qui se sont évaporées comme neige au soleil. L’intime s’étiole dans la langueur de jours dont on n’attend plus grand chose. Des morceaux de soi ainsi dispersés, mais comme on n'en sait plus rien, cela n'a guère d'importance. Écrire au travers des strates, manière de se réinventer.

vendredi 12 avril 2024

Jalousie des mots / 14

 


Quand, au fond de soi, se referment les paupières des vases, ne dévoilant plus rêves ou pensées de l'insaisissable, on reste sans voix, prisonnier de sa forteresse dont plus rien ne parviendra à s'évader. Quand à la profusion du bruit du monde, gavé de borborygmes inutiles et de leurres dorés, se mêlent les absences de tous ceux qui importent, dont le manque est éternel, et que ces gémissements recouvrent son champ de vie, il est impératif de découdre les étoiles du désespoir. Au prélude du nouveau regard à poser sur l'enclave où trouver refuge, accueillir le temps d'errance à errer.

samedi 6 avril 2024

Jalousie des mots/ 13

 



Des pensées en marche qui n'en finissent pas de nourrir les jours, montant du fond de soi, comme une rumeur que l'on ne peut étreindre, ni éteindre, insaisissable mais qui jusqu'au vertige guide nos pas. Elles portent en elles un chant d'horizon, rêvant d'échos à venir, faisant palpiter des étincelles, bâtissant des passerelles, creusant des tunnels, afin de détourner les écueils. Au désarroi qui souvent nous recouvre, ces pensées abandonnent quelques traces sur l'ennui de nos peaux: quelque songe accroît l'espace qu'il nous reste, ébranle les barrières savamment érigées, souffle sur des sursauts de braise, dont on ne savait rien.

samedi 30 mars 2024

Jalousie des mots/12

 


Comme des peupliers frissonnants au bord d'un ruisseau, cela remue au fond de soi, et des choses oubliées remontent à la surface. Le perdu, bien reclus dans l'enclave de l'esprit, dans des quartiers obscurs et que l'on ne pensait pas faire renaître, se contemple en face. Regarder, analyser, juger ou plutôt peser ce qu'il en est de ce passé, classer les éléments qui se font jour, réfléchir à ce que l'on peut bien en conserver. Ensuite, rien. Ne pas se presser. On sait ce que l'on a redécouvert. Il reste encore à cheminer dans ce que l'on ne sait pas.





dimanche 24 mars 2024

Jalousie des mots/11

 


Arborescence de lieux dans le marais de la mémoire; des marges aux mousses délicates élargissent l'espace, déplacent les lointains dans un lointain toujours plus vaste, où l'esprit ne s'est pas aventuré depuis fort longtemps et font résonner quelques mélodies apaisantes. C'est ton livre d'intériorité qu'il t'appartient de feuilleter avec attention ou désinvolture, c'est à chacun de choisir comment il se situe face au passé dont il est issu grâce ou à cause selon les vocables choisis ― et te voilà à errer dans ces frondaisons intérieures à rechercher peut-être un ancrage perdu. Ainsi découvrons nous la trame d'une vie.

samedi 16 mars 2024

Jalousie des mots/ 10

 

 


Dans les tiroirs des passés, des vagues d’ombres, volutes oubliées, s’élèvent, stagnent quelques instants au-dessus de nous, puis semblent se dissocier comme des étincelles s'évanouissant dans les airs. Sans regrets, les souvenirs, fatigués d'empêcher le présent de se dérouler, de s'accomplir avec tranquillité, s'éteignent et meurent dans la friche des jours, sans laisser de surgeons renaître, éteints sans espoir de résurrection. Cela paraît simple et efficace, c'est tout au moins ce que l'on espère parfois, d'arriver à se forger une vie, sans trop d'efforts, libre et allégée du poids des années écoulées, et parfois même des vies qui ont précédé.

dimanche 10 mars 2024

Jalousie des mots/ 9

 


Sur la carte d'une vie qui semble se dessiner, s'érigent des morceaux de réels ou que l'on a pensé tels, de longs tunnels d'ombres ou de vies somnambules, avec par à-coups de grandes bouffées d'air et de lumière qui s'épousent, puis se fuient. Comme un verso de soi à la recherche d'un reflet et qui, peut-être, en ombre portée, dessine un invisible au travers des averses. Traces presque préhistoriques que l'on cherche à reconnaître, à déchiffrer les signes oubliés et à recueillir les éléments fragiles à manier avec précaution. Du peu, du presque rien à ne pas laisser se perdre.



samedi 2 mars 2024

Jalousie des mots/ 8

 


On ne sait rien, ou bien si peu de choses. On avance, dans le mouvement des épreuves puis des joies. Le balancier qui gère les vies, va des unes aux autres, oscille plus fortement d'un côté, puis revient vers l'autre, cela chavire un peu, les épaules s'affaissent, puis se rehaussent, on ressent bien toute sa fragilité. L'esprit s'embourbe dans des pensées somnambules, informes, tout devient fade autour de soi. C'est comme ça. Il faut attendre le retour du balancier. Il va revenir, c'est certain. On y croit avec force. De cette force intime, infime, qui va faire bouger les lignes.

samedi 24 février 2024

Jalousie des mots/ 7

 


Aux alentours des émotions, celles qui drainent la tristesse notamment, trouver une bifurcation sur ce chemin aux traverses bien connues, afin de prévenir quelque chute dont on ne se remettrait pas. Suivre des yeux le vol d'une mésange entre les arbustes du jardin, qui semble un peu perdue, mais ne serait-ce pas plutôt moi qui erre entre les strates des intervalles de ma vie, au sein des émiettements de silences qui fleurissent çà et là. Reconnaître le signe d'une présence, d'un message qui chercherait à être délivré, comme si un souffle invisible venait me sauver, et apaisait les pensées âpres.

dimanche 18 février 2024

Jalousie des mots/ 6

 


Dans la tête cela bouillonne de jadis assourdissants jusqu'aux tréfonds de l'être qui me recouvre. Les choses de la vie vont et viennent, les veilles et les lendemains s'enchaînent de manière assez féroce, les uns et les autres empilent les nouvelles une bonne, une mauvaise histoire de donner une sorte d'équilibre ou d'harmonie entre les instants qui n'ont guère le temps de s'éterniser, et de laisser un peu d'air filtrer pour reprendre quelques couleurs. Sans doute, c'est une manière de nous rappeler que la vie est fragile et fugace, et qu'il faut se tenir prêt, à tout moment.

samedi 10 février 2024

Jalousie des mots/5

 


Quel est ce songe d'opacité qui vient vriller de temps à autre de son éclat les parois de mon labyrinthe neuronal, où les cartilages de la boîte crânienne, heurtés par les à-coups ressentis frémissent d'une forme de joie métaphorique, qui ressemble, toute proportion gardée, aux tableaux de Chagall, où tout plane, tout vole sans raison apparente, mais sans déraison non plus. On souhaiterait séjourner plus longtemps dans cette ambiance où peu à peu la conviction d'une vie autre est sans doute possible. Puis le songe tourne la page et on regrette de ne pas avoir posé un regard plus méticuleux.

( Voilà un mois que cette rubrique "Jalousie des mots" se construit. Elle est donc faite de 100 mots dont 7 mots -- un noté chaque jour -- à inclure dans un texte de 3 phrases. Le terme jalousie est en rappel de la rubrique "Jalousie des jours" qui s'est déployée ici pendant 79 semaines, tentant d'évoquer, non ce qui filtre du jour, mais ce qui filtre entre les mots, comme au travers d'une jalousie. Une de mes photos tente de faire écho au texte qui s'est écrit à la fin de la semaine.)