J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

samedi 13 avril 2013

Sylvia Plath

Chez moi le présent c'est pour l'éternité, et l'éternité ça bouge tout le temps, ça fond et ça coule. Cette seconde, c'est la vie. Et quand elle est passée, elle est morte. Mais on ne peut pas recommencer à chaque nouvelle seconde, il faut partir de ce qui est mort. C'est comme les sables mouvants...sans espoir dès le départ. Une histoire ou un tableau peuvent raviver un peu la sensation, mais c'est insuffisant, vraiment insuffisant. Seul le présent est réel, et je sens déjà le poids des siècles qui m'étouffent. Il y a cent ans vivait une jeune fille comme moi je vis aujourd'hui. Et elle est morte. Moi je suis le présent mais je sais que je passerai aussi. Les grands moments, les éclairs brûlants passent comme ils viennent, dans d'incessants sables mouvants. Et moi je ne veux pas mourir. 
(août 1950)

Sylvia Plath Journaux 1950-1962   (Gallimard septembre 1999 )

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