J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mercredi 7 août 2013

l'intuition de l'instant

En tout vrai poème, on peut trouver les éléments d'un temps arrêté, d'un temps que nous appellerons vertical pour le distinguer du temps commun qui fuit horizontalement avec l'eau du fleuve, avec le vent qui passe. D'où un paradoxe qu'il faut énoncer clairement: alors que le temps de la prosodie est horizontal, le temps de la poésie est vertical. La prosodie n'organise que des sonorités successives; elle règle des cadences, administre des fougues et des émois, souvent, hélas à contretemps. En acceptant les conséquences de l'instant poétique, la prosodie permet de rejoindre la prose, la pensée expliquée, les amours éprouvées, la vie sociale, la vie courante, la vie glissante, linéaire , continue. Mais toutes les règles prosodiques ne sont que des moyens. Le but c'est la verticalité, la profondeur ou la hauteur; c'est l'instant stabilisé où les simultanéités, en s'ordonnant, prouvent que l'instant poétique a une perspective métaphysique.

Gaston Bachelard "L'intuition de l'instant" 
(cité dans le livre de Bertrand Leclair "Verticalités de la littérature")

1 commentaire:

Ange-gabrielle a dit…

Mon plus beau livre "l'intuition de l'instant" Je l'ai lu chaque été régulièrement depuis mes 17 ans et ne m'en lasse pas