J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mardi 17 septembre 2013

Chronique d'hiver




Pour faire ce que tu fais, il te faut marcher. Marcher, c'est ce qui attire les mots à toi, ce qui te permet d'entendre les rythmes des mots à mesure que tu les écris dans ta tête. Un pied en avant, puis l'autre, le double battement de tambour de ton cœur. Deux yeux, deux oreilles, deux bras, deux jambes, deux pieds. Ceci, puis cela. Cela, puis ceci. Écrire commence dans le corps, c'est la musique du corps, et même si les mots ont un sens, s'ils peuvent parfois en avoir un, c'est dans la musique des mots que commence ce sens. Tu t'assieds à ton bureau pour noter les mots, mais dans ta tête tu es encore en train de marcher, toujours en train de marcher, et ce que tu entends, c'est le rythme de ton cœur, le battement de ton cœur. Mandelstam: "Je me demande combien de paires de sandales Dante a usées en travaillant sur la Commedia". L'écriture comme forme inférieure de danse.

Paul Auster "Chronique d'hiver" ( Actes Sud 2013)

2 commentaires:

Estourelle a dit…

la danse comme forme intérieure d'écriture...
la marche une écriture silencieuse...

j'adhère
merci pour ce partage de Paul Auster

Patrick Lucas a dit…

les mots naissent sous la peau
entre la tête et le coeur
avec une envie d'éclater
... alors on court à la recherche
d'un papier de secours ...:-))
j'en ai partout !!