Si souvent, dans l'enfance, il doit vous sembler que la vie qui vous est faite n'est pas vraiment la vôtre, qu'une sorte d'erreur ou de maldonne dans la distribution des rôles vous a attribué une place qui n'est pas faite pour vous et qui n'est pas la vôtre, et en attendant patiemment que cette sorte d'erreur apparaisse au grand jour et que soit corrigée cette fâcheuse maldonne, vous vous sentez comme en sursis, jouant votre rôle imposé sans conviction, assez confiant en somme, convaincu qu'un jour ou l'autre arrivera bien le moment où l'erreur et la maldonne seront réparées et où vous serez enfin rétabli dans la seule vie qui vous était due et où vous serez enfin là où vous deviez être, exactement ce que vous êtes, entièrement vous-même, adéquat à vous-même, collé à vous-même comme l'est à la chair des noix cette peau très fine qui enveloppe ses circonvolutions compliquées.
Jean-Paul Goux " Les hautes falaises" ( Actes Sud)
Jean-Paul Goux " Les hautes falaises" ( Actes Sud)
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