Elle est noire et
recouvre la salle de sa propre noirceur. Il n’y a rien d’autre
que cette grande paroi de verre sombre – the big wave – cette
déferlante de six mètres de haut et de quinze de long, ce mur de
verre qui recouvre le silence de la salle du musée, mosaïque de dix
mille briques où se reflètent les lumières de sécurité des
petits blocs au-dessus des portes . Elle porte toute la nuit en elle
et enserre l’invisible renvoyant l’écho de toutes les
noirceurs, les angoisses, les peurs, les solitudes de tout un chacun
qui est venu pendant le jour arpenter , regarder, se heurter à cette
masse et qui n’est plus là pour s’y confronter. “Face à
l’obscurité”* est le nom donné à cette exposition qui hante la
grande salle centrale du musée, et à l’opposé de cette vague
gigantesque, des blocs noirs d’obsidienne plantés là , prêts à
résister à l’enfouissement , faits de cette même force obscure
face à l’heure ultime. Dans l’espace de la nuit, une danse où
les volumes se répandent et se répondent en un sentiment
d’euphorie ou de désespoir, partageant une forme de gloire pour
cette verticalité qu’ils arborent. Ce tsunami de pierres étalé
en un long silence , enroulé dans cette opacité pleine d’une
mémoire qui palpite encore un peu et dans une immobilité
énigmatique, se nourrit à cette épaisseur nocturne que l’écriture
tente de dérouler mais ne fait qu’enrouler dans ses propres
ombres. C’est cette vague qui vient au devant et qui stagne dans
l’inaccompli de l’apparition. Vertige . Ailleurs, dans les autres
salles du musée, tout est en sommeil.
* Exposition de
Jean-Michel Othoniel au MAMC de Saint-Etienne
20 ème texte (correspondant à la proposition d'écriture de la vidéo 20) pour
l'atelier d'écriture d'été animé par François Bon sur son site
Tiers-Livre: " Construire une ville avec des mots".
2 commentaires:
elle était déjà très belle en mots
Merci Brigitte: votre regard m'est précieux!
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