Toussaint
Cela, comme aux premiers jours de novembre. Les allées de graviers sont presque aussi luisantes que les tombes. On visite des morts sous la pluie. Il y a foule. Des voitures mouillées sont rangées en file. Les enfants s’impatientent et grimacent derrière les vitres, ils dessinent du bout des doigts des bonhommes de buée.
Cela fréquente surtout les grilles des cimetières entrebâillées l’après-midi et qui grincent. Il ne voudrait pas déranger les dormeurs dont la poussière est si fragile. Les dalles de pierre surplombées de croix bizarrement alignées sont plus ridicules que les maisons des vivants. Il marche par là comme sur un rivage : si étroite et close que soit cette nécropole, le même sentiment d’exil l’y empoigne et le brise. La pierre tient à distance. Il faudra bientôt repartir et fermer les yeux : la chambre seule connaît parfois des éternités semblables à celle du sépulcre.
Jean-Michel Maulpoix "Ne cherchez plus mon cœur" ( Éditions Publie.net)
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