En écrivant, tu déploies une ligne de mots. Cette ligne de mots est un pic de mineur, un ciseau de sculpteur, une sonde de chirurgien. Tu manies ton outil et il fraie un chemin que tu suis. Tu te trouves bientôt profondément engagé en territoire inconnu. S’agit-il d’une impasse, ou bien as-tu localisé le vrai sujet ? Tu le sauras demain ou dans un an. (…)
La ligne de mots est un marteau.Tu t’en sers pour explorer les murs de ta maison. Tu les tapotes, doucement, partout. Après les nombreuses années passées à étudier ces choses, tu sais à quel bruit prêter l’oreille. Certains murs sont porteurs ; il faut qu’ils restent en place, sinon tout l’édifice s’écroulera. D’autres murs peuvent disparaître sans dommages ; tu sais entendre la différence. Malheureusement, c’est souvent un mur porteur qui doit disparaître. On n’y peut rien. Il n’y a qu’une solution, qui te consterne, mais c’est comme ça. Flanque-le par terre. Gare.
Annie Dillard "en vivant, en écrivant" ( Christian Bourgois )
traduction de Brice Matthieussent
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire