J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mardi 12 mars 2024

Ricochets/ 10

 


1/ Des encore à venir, j'en ai plein ma besace. Des projets d'écriture personnels, des idées pour des ateliers d'écriture, des livres à lire, des lieux à découvrir, à retraverser, des moments à passer avec mes petites-filles, des gens à rencontrer. Et des moments de rien où tout se met en place, une sorte de dimanche. Un vide plein d'appels: se tenir à fleur de peau, dans cette attente du rien.

2/ Savoir qu'au plus profond de soi il y a toujours une parole cachée, perdue, dont on ne sait plus rien, enfouie sous le tas de feuilles mortes que sont les jours qui passent. Peut-être restera-t-elle à jamais dans ce grand silence, ou renaîtra-t-elle un jour de grand vent, de bouleversement dont on ne sait encore ni le jour ni l'heure, qui la fera s'élever et planer dans toute sa candeur.

3/ On voudrait bien aller sans détour, droit au but. Mais les yeux ont besoin d'une pause, de fixer quelques instants le vol d'un oiseau, un petit parterre de fleurs, une silhouette qui marche dans la rue et s'éloigne paisiblement, ou l'horizon tout simplement. Tout le reste du monde, on n'en peut plus; on n'a pas l'étoffe pour cela. On restera avec ses questions sans réponses sans se forger des illusions.

4/ Ouvrir une brèche dans le banal, laisser les battements d'ailes se propager, se lover dans les murmures de voix qui s'élèvent soudain . Comme sur un levain qui se forme et enfle, la focale du regard se déplace, et l'on se laisse glisser sur les pentes de la métamorphose. Le présent élargit ses parois et l'on se voit, se reconnaît dans un en train d'être que l'on ne soupçonnait pas.

5/ Sous l'écume des pensées, comme une vague inconnue qui balaie, va et vient sans savoir ce qui émergera, ce que l'esprit sauvera de ce magma, de ce mélange de matières et d'odeurs. Des métaphores se dessinent, mais on ne garde que ce que l'on peut, parmi toutes les images qui défilent, on laisse peut-être bien filer les plus surprenantes, incapables de saisir ce qui se met à étinceler, embarque au-delà.

6/ Se laisser porter et ne plus fixer des yeux la rive où pouvoir s'accrocher. Il serait temps. Le bal des freux au-dessus des maisons enveloppe les pensées. Cela tinte, s'entrechoque comme de la vaisselle dans les buffets lorsque s'énerve la terre. L'espace de l'enfin élargit ses murailles, entrecroise ses chemins, il suffit d'aller, dans la confiance de l'instant, un peu plus avant. La vie a encore des portes à entrouvrir.

7/ Et si c'était une manière de se dédoubler lors de l'animation d'ateliers d'écriture. Un jeu de théâtre, un peu similaire au rôle d'enseignant, mais face à des adultes, dont je ne sais pas forcément grand-chose de leur vie au quotidien. Un pari, avec toujours un doute au démarrage, de les emmener sur une terre nouvelle, dont ils n'avaient aucune idée, à leur arrivée. Et la confiance qu'ils ont me ravit.

1 commentaire:

estourelle a dit…

C'est super chouette
sachant que j'adore les chouettes...