Depuis l’aube jusqu’à son coucher, nous avons suivi le cheminement du soleil: il s’est levé, s’est couché, a enluminé la mer et son rivage, a suscité la vie dans le paysage, oiseaux et fleurs se sont révélés, des objets inanimés se sont même animés dans les maisons soudainement baignés de lumière. Une journée mais c'est peut-être bien toute une année qui s'est écoulée, ou une vie. Le temps est distendu, les repères se perdent. Une densité de couleurs, de sensations, de métaphores avec des "as if ", des "comme" assénés, des coups de poings pour tenter de dire.
Le soleil tombait en coins affûtés dans la pièce. Tout ce que la lumière touchait était soudain doté d’une existence frénétique. Une assiette était comme un lac blanc. Un couteau ressemblait à une dague de glace. Tout à coup des gobelets se révélaient cerclés de stries de lumière. Tables et chaises montaient à la surface comme si elles avaient été plongées dans l’eau et remontaient, pelliculées de rouge, orange et pourpre comme la pruine sur la peau de fruits mûrs. […] Et, à mesure que croissait la lumière, des troupeaux d’ombres fuyaient devant elles et s’agglutinaient et demeuraient à l’arrière-plan en replies aux multiples froncis.
Et dans chaque interlude des vagues qui déferlent sur le rivage. Une litanie de vagues qui nous portent à l'interlude suivant et jusqu'au bout du livre. Dans la houle d'une éternité toujours recommencée.
Pendant deux ans, nous avons lu, traduit, relu, travaillé nos traductions, comparé, discuté puis écrit en écho aux interludes des Vagues. Nourris de cette écriture si intense de Virginia qui insufflait dans notre pratique un quelque chose qui n'existait pas auparavant, différent pour chacun, une marche où se hisser et où regarder alentour d'un œil autre. Écrire avec en soi la vigueur de Virginia.
Une fois ce travail de lecture – traduction – écriture achevé, nous avions accumulé un matériau dans lequel retravailler encore afin de constituer un recueil collectif de nos textes. Un choix à réaliser parmi tout ce qui avait été écrit. Quarante klasmas réunis, quatre par interlude, avec rigoureusement le même nombre pour chacun d'entre nous. Et là encore la tache de se relire, de se pousser l'un l'autre vers une écriture dense, le respect des contraintes que nous nous étions données, la mise en forme finale en intégrant la langue originale, notre traduction et posé en vis-à-vis un klasma. En voici un exemple:
Et, le souhait, le désir, le besoin, la nécessité, pour nous quatre, que ce recueil trouve la porte ouverte d'un éditeur et des lecteurs.
1 commentaire:
Je souhaite tellement qu'une porte s'ouvre pour la parution de ce recueil et croise les doigts très fort pour que nous puissions un jour l'avoir entre les mains
Ange-gabrielle
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