Des connivences se sont installées. Un échange avec Christine Jeanney, dont le Journal de bord des Vagues m’a tellement apporté et aidé dans mon immersion dans ce livre, se produit de temps à autre. Là, c’est à propos de sa traduction de la nouvelle de Virginia Woolf Kew Gardens, que nous correspondons. Après sa traduction, que j’ai suivie sur son site Tentatives, Christine qui est aussi plasticienne a réalisé un livret format flutter ( terme qui m’était inconnu!). Elle le présente ainsi :
« le
livret Kg ressemble
à un leporello, mais le leporello est d’ordinaire une longue bande
de papier ou de cartonnette pliée sans qu’il y ait collage entre
chaque page
le livret
Kg est
un Flutter
book,
"flutter"
signifiant en anglais palpiter, battre des ailes (ce qui rappelle le
vol erratique des papillons de
Kew gardens) » .
Elle parle d’un texte devenu objet à façonner. Elle décrit
également toute la méthode pour le fabriquer soi-même. Mes
compétences manuelles étant nulles j’ai préféré lui demander
un exemplaire tout prêt qu’elle m’a fait parvenir avec beaucoup
de gentillesse. J’aime bien cette nouvelle, je prends d’ailleurs
beaucoup de plaisir à lire ou relire les nouvelles de VW. Dans
celle-ci,
publiée
en 1919, on retrouve la technique de narration liée au flux de
conscience. La
narratrice sillonne les allées du jardin de Londres, Kew gardens,
près
duquel Virginia a vécu dans sa jeunesse, et
offre au
lecteur
des évocations de passants qui
traversent les lieux
ou se
penche sur
la vie des plantes ou animales que
l’on peut y rencontrer. On se demande si ce n’est pas le jardin
lui-même qui nous parle . Des promeneurs échangent des propos, une
histoire pourrait commencer à s’écrire, mais ce sont d’autres
personnages qui prennent le devant de la scène ou un escargot !
Nous
traversons un tableau impressionniste, écoutons quelques voix, nous
réfugions au cœur des plantes. Lire cette nouvelle à la vitesse de
l’escargot...
À la fin de sa traduction et du journal de celle-ci, que Christine Jeanney nous offre, elle note ceci :
je
fais toujours dans mon esprit le rapprochement entre la nouvelle Kew
gardens et une boule à neige
un globe parfait que VW a retourné
pour faire apparaître les petits reflets argentés qui dormaient au
fond, et qui flottent quand elle écrit cet espace réduit qui est le
nôtre, notre petit globe de monde, avec ses folies comme des
cicatrices mal refermées, ses incompréhensions, les amours passés
et futurs, ses épiphanies, ses guerres terribles et minuscules, son
chatoiement, ses couleurs et ses formes offertes comme ça, pour
rien, gratuitement, dans lesquelles les humains baignent sans s’en
rendre compte
quelque chose de grave, terrible, tranquille
un
"tout à la fois" complètement beau
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