J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

lundi 8 septembre 2025

Ricochets/ Année 2/ Semaine 36

 


1/ Un faisceau de lumière insolite, pourrait-on écrire, qui s’échappe des pages d’un livre, qui tente de nous surprendre, de nous éveiller de la forme d’assoupissement qui commençait à nous envahir, malgré, nous semblait-il, une attention de la lecture soutenue. Là dans ce rayonnement de mots une haute tension soudaine, une densité d’être en expansion, simplement revivifiée par quelques mots mis bout à bout, comme un fil à ne pas lâcher.

2/ Le réel du matin, quand on ouvre les yeux sur ce qui nous entoure, quand on se remémore le rêve de la nuit qui pourrait peut-être nous faire progresser en nous-même, ce réel avec les rayons de soleil qui entrent dans la maison, un peu plus tard chaque jour, ce réel avec lequel il va falloir composer – douleurs, fatigue, soucis mais aussi projets, rencontres, balades – : chaque matin à embrasser.

3/ Réorganiser la pièce où je lis, j’écris, je vis ( je travaille?) est nécessaire, souvent à chaque rentrée scolaire, comme le souvenir de ma vie d’avant. Et jeter. Il y a un temps pour jeter. Il y a un temps pour tout. Et il y a tant de choses, de papiers inutiles dont je pourrais me séparer. Jeter pour faire de la place en soi. Je progresse à petits pas.

4/ La stabilité et l’instabilité de l’instant ensemble ressentis. À vivre debout. Pieds nus sur un terrain glissant. Lumière à l’avant de soi et ombres qui jaillissent. Tout se vit dans une forme de respect. L’équilibre et le déséquilibre comme moteurs d’avancée, dans une coexistence pacifique. L’instant ajouté à un autre instant et encore un autre dans une conscience claire et sereine de ce qui a lieu est un pourvoyeur d’horizons.

5/ Avant de décider d’aller quelque part, on se lève et on choisit simplement d’aller. Peu importe la destination. Quel que soit le sentier où se pose le pas, c’est la marche qui importe. Mettre en mouvement le corps en une quête de métamorphose. Attendre sans rien susciter. L’esprit se tient en embuscade. Prêt à traduire ce qui monte du pas au contact de la terre, dans cette intimité des sens.

6/ Vivre à l’ombre de tout ce qui a déjà été gravé sur les pages des livres. De cette ombre naît la lumière nécessaire. On feuillette un recueil, quelques lignes se lisent dont on ne savait pas la couleur, la richesse, l’espoir qu’elles pouvaient apporter, la sérénité aussi. Le regard qui se déplace alors est riche de ce qu’il vient de lire et se dépose avec douceur sur les entours.

7/ Le halo de silence où je me tiens le plus souvent possible, rayé par le chant des oiseaux certains matins, dont je réalise que ces jours-ci je ne les entends plus, ce lieu donc, où je suis recluse, dans la pénombre des étagères de livres qui veillent derrière moi, m’est indispensable. L’impression d’exister uniquement dans ce lieu. J’ai cette chance inouïe de pouvoir y être, au sens fort du terme.



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