Tu restes dans ton coin, guettant, et la musique tourbillonne autour de toi, la
java du sens. Tellement sollicitée la danseuse du sens !
Alors tu te tournes vers la vitre noire du salon et tu sais que dehors les
arbres frémissent de cette solitude particulière qu’ils ont acquise et qui est
toute leur vie d’arbres.
Frémissent, hors du sens, jetés là comme des signes qu’il nous faut interroger.
Écorces du vouloir.
Les arbres frémissent, ils sont aussi danseurs. On voudrait se jeter dans cette
assemblée, cette silencieuse épaisseur, cet épanouissement. Mais la danseuse du
sens est ici interdite, clouée.
La musique vient d’ailleurs, c’est-à-dire
que personne ne l’entend. On subit cet autre danse parce qu’elle semble soudain
visible. On s’avance
mais l’ombre dit :
« N’allez-vous pas regretter d’alourdir encore ces branches ? N’y a-t-il
pas mieux à faire qu’à rançonner ce fruit ? »
Et tout ce bruit des racines, soudain, cette noire musique, pousse à l’allègement.
C’est à un arbre de brouillard que je songe.
Un arbre pour passer au travers.
Pierre-Albert Jourdan, extrait de «L' Espace de la Perte », dans Le Bonjour et l’adieu, (Mercure de France,
1991)
J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)
mercredi 13 janvier 2021
Arbre
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1 commentaire:
Et oui, n'y a t-il pas mieux à faire ? Se contenter de frémir, de danser avec la vie
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