Sans doute est-ce pour m’inciter et m'autoriser à aller au bout du livre Les Vagues que j'ai proposé en septembre 2022 à l’un de mes ateliers dans lequel je participais également ( dans les autres je n’écris pas avec les participants), un travail de traduction des neuf interludes du livre, suivi d'écriture en écho. Il n'était pas question de traduire l'intégralité du livre mais de se concentrer sur ces passages en italiques, qui vont et viennent, rythment le livre, délivrent l'ombre et la lumière, oscillent en permanence entre le dehors et le dedans, les heures du jour, de l'aube au crépuscule, ainsi que les saisons et le parallélisme avec les âges de la vie. On retrouve en permanence le jeu des vagues sur la mer et de la lumière dans la maison. Ce travail s'étalera sur deux années scolaires, sans que nous ayons perdu pied et avec un enthousiasme continu.
Une manière encore détournée de ne pas tout lire...mais en allant au plus près du texte. Il y avait l'envie depuis longtemps de se frotter au travail de traduction, mais avec parcimonie, pour entrer avec plus d’insistance dans la langue de Virginia, creuser notre propre langue et faire bouger un peu notre écriture. Nous n’étions plus que quatre dans ce groupe, nous connaissant depuis plus de vingt ans par le biais d’atelier d’écriture. Il fallait aborder quelque chose de neuf entre nous. Engouement et crainte nous habitaient, mais nous avons tous quatre relevé le défi, même si nos années de pratique de la langue anglaise remontaient pour certains à nos études au lycée.
...plus
je traduis les Vagues plus je mesure à quel point l’espace s’ouvre
à l’intérieur des phrases, plus je mesure que traduire c’est
écrire avant tout, mais au cœur d’un reflet qu’on fait naître
soi-même, exonéré de la poussière figée des phrases mortes,
comme si le texte que l’on devait traduire s’écrivait en même
temps que soi, pris dans le temps présent et toujours vif, et tous
les questionnements qu’il engendre sont vrais, véritables, et au
présent, ou au
futur,
traduire serait cette avancée avec cet autre qui continue à dire
nous
confie Christine Jeanney dans un de ses articles sur son site.
Après deux ou trois séances de tâtonnements, nous avions décidé de faire chacun une traduction chez nous, de prendre ce temps de nous immerger dans la langue, de la questionner, de nous trouver parfois face à des incompréhensions, puis lors de nos rencontres bimensuelles, partagions notre travail, en nous confrontant aux traducteurs officiels : Marguerite Yourcenar, Michel Cusin, Cécile Wajsbrot, ainsi que Christine Jeanney. Je poursuivais en parallèle la lecture du blog de Christine, qui elle s'attelait à l'intégralité du livre, me nourrissant de ses questionnements, de ses réflexions, ainsi que celles des lecteurs de son blog qui participaient par le biais de commentaires. Quelle richesse où puiser!
Dans Nevermore, livre lu juste avant de me lancer et d'entraîner mes amis dans cette aventure, j'ai noté cette phrase de Cécile Wajsbrot: La traduction est une science inexacte, une tentative, toujours non vouée à l'échec mais à l'imperfection. D'une langue à l'autre, la barque du passeur se heurte à des obstacles, qu'elle affronte ou contourne, des vagues ou une simple houle, des courants contraires ou porteurs. C'est une traversée avec un point de départ et un point d'arrivée mais de l'un à l'autre, une seule personne connaît le voyage et ses écueils, celle qui en a parcouru toutes les étapes.
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