J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

dimanche 15 mai 2011

Adieu

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Elle attendait sous l’abribus. Le sac collé contre
la hanche, d’une main pressait sa bandoulière,
de l’autre maintenait son écharpe, la remontait,
qu’elle couvre sa bouche, soufflait
l’air chaud à l’intérieur, qu’il se diffuse, lançait
un nuage de vapeur par-dessus, il faisait froid.
Le bus a freiné bruyamment, puis a ouvert ses
portes. Elle est montée. Sa silhouette est restée
sous l’abri à attendre pendant qu’assise derrière
la vitre elle se regardait s’éloigner.
La tête qu’on baisse vers le sol pour s’éviter,
oublier qu’on s’est vu, minuscule, dans une
rue adjacente. La grisaille lisse de son visage
qu’on appréhende. Les gestes que l’on rate, les
brûlures silencieuses inconsolées. Et les reflets
de soi qu’on abandonne sans esquisser un
geste, un simple signe, un insupportable au-revoir.

Christine Jeanney “Fichaises” édité chez Publie.net

1 commentaire:

Ange-gabrielle a dit…

J'ai eu souvent en attendant le tram 28 à Lisbonne, cette sensation d'être là et là et aussi là, dans un temps qui s'étalait sans s'écouler.Ce texte est très beau