Alors que je me serais plutôt attendu à l'enchaînement de visions un peu sinistres que ce genre de maison de repos manque rarement de provoquer - vieil homme avançant péniblement derrière son déambulateur dans un couloir beige orné de plantes vertes et d'affiches reproduisant des tableaux impressionnistes, groupe de vieilles femmes en robe de chambre s'efforçant de boire une tisane ou un thé au goût de carton dans un réfectoire où un sapin de Noël décoré que personne ne regarde clignote sans fin - , je me retrouvais dans une sorte d'apothéose hivernale: non ces jours où une lumière d'or accentue les reliefs en les creusant, accordant à toute chose d'avoir l'air de séjourner - un instant - hors du temps, mais un de ceux, et ils sont moins nombreux encore, où le concours du brouillard et du soleil aboutit à une sorte d'émulsion qui est comme un milieu de lumière vaporisée où tout semble flotter et être en gloire, la visibilité, à laquelle pourtant en règle générale on tient, étant remplacée par l'affirmation sereine, enthousiaste, juvénile et sans âge, d'un pur rayonnement.
Jean-Christophe Bailly " Le dépaysement Voyages en France" (Seuil 2011)
4 commentaires:
Quelle écriture ! Et quand il parle, je l'écouterai sans fin
J'ai bien regretté de n'avoir pu l'écouter la semaine dernière...mais je me rattrape en le lisant!
Des échos riches de ce livre ici: http://poezibao.typepad.com/flotoir/
heureusement que ces moments existe
peut être que l’additionnement de ces moments de "grâce" fait une vie et que l'on peut en être heureux!
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