J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

dimanche 12 octobre 2014

s'arrêter


Aujourd'hui, je suis entrée dans cet instant incertain où mon regard se pose sur l'envers de la ville. Je me laisse voguer sur ses rimes intérieures adoptant la nonchalance d'une gondole en humant ce qui flotte légèrement dans l'air. Se tenir dans ce passage comme sur le traghetto entre deux rives, debout et droit en un équilibre parfait, et voir au-delà des apparences. Le regard brouillé, se plonger dans les reflets rouges et ocres qui irriguent Venise, et tenter d'y déchiffrer les promesses du jour qui s'éveille . S'arrêter et regarder le feuillage au-dessus d'un mur révélant en tendresse la présence d'un jardin, d'une enclave de paix où la ville pleine de bruits s'estompe. Caresser d'une main amie les plaies de crépi qui suintent sur les murs, s'infiltrer dans les calli, se laisser se perdre et puis se perdre encore, lire les noms des ruelles et les réciter en un chapelet païen , se laisser envoûter par la langue qui s'éclate dans la bouche comme une grenade bien mûre, s'attarder dans une corte et adossée à un puits laisser monter des pensées incontrôlables, ne rien faire d'autre qu'espérer ce dialogue avec l'ange assis sur la margelle.


Extrait d'un texte écrit dans le cadre de l'atelier d'écriture "à la brise de". L'intégralité du texte , la consigne et les textes d'autres membres de l'atelier se trouvent ici.

1 commentaire:

estourelle a dit…

"Se laisser perdre et puis se perdre encore"...j'aime bien même si c'est exigeant! C'est comme un lent processus d'oubli _et_ de mémoire