parfois je
reste dans le noir
invisible,
infini, inutile
un battement
de peu
juste une
frange de moi-même
un point bleu
d’un
petit rien embroussaillé
Cette
rubrique Détourtweets comme une deuxième vie pour des messages récoltés
çà et là... (merci au compte tweeter de Brigetoun !)
J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)
mardi 30 janvier 2018
lundi 29 janvier 2018
Navigations / 4
Egarements \
S’orienter semblerait être la priorité absolue quand on est en mer. Lorsqu’on navigue, l’orientation est la condition de la survie. Et pourtant, ce n’est pas si simple. Car c’est l’ambiguïté entre orientation et égarement qui fait le charme du bateau. On vit en ayant l’impression que tout point de repère est en même temps un piège, puisqu’il ne donne qu’une idée vague, monodimensionnelle de l’espace. Le marin aime cette incertitude, en fait sa liberté. Un marin doit toujours être dans l’équilibre complexe entre savoir où il est et l’ignorer. Il lui faut ce minimum de connaissance sur sa position qui lui permet de ne pas mourir, tout en restant dans un maximum d’ignorance qui lui permet de tracer ses propres trajectoires. Finalement, la seule chose qui compte vraiment en mer, c’est de savoir où l’on n’est pas : il ne faut pas être sur les cailloux, voilà ce qui est sûr. Pour le reste, peu importe ! C’est cette ivresse sobre que j’adore. C’est une ignorance savante, un égarement orienté.
Marcello Vitali-Rosati " Navigations" Editions Publie.net
S’orienter semblerait être la priorité absolue quand on est en mer. Lorsqu’on navigue, l’orientation est la condition de la survie. Et pourtant, ce n’est pas si simple. Car c’est l’ambiguïté entre orientation et égarement qui fait le charme du bateau. On vit en ayant l’impression que tout point de repère est en même temps un piège, puisqu’il ne donne qu’une idée vague, monodimensionnelle de l’espace. Le marin aime cette incertitude, en fait sa liberté. Un marin doit toujours être dans l’équilibre complexe entre savoir où il est et l’ignorer. Il lui faut ce minimum de connaissance sur sa position qui lui permet de ne pas mourir, tout en restant dans un maximum d’ignorance qui lui permet de tracer ses propres trajectoires. Finalement, la seule chose qui compte vraiment en mer, c’est de savoir où l’on n’est pas : il ne faut pas être sur les cailloux, voilà ce qui est sûr. Pour le reste, peu importe ! C’est cette ivresse sobre que j’adore. C’est une ignorance savante, un égarement orienté.
Marcello Vitali-Rosati " Navigations" Editions Publie.net
samedi 27 janvier 2018
Tessons/ 4
j'écoute
une voix
me détacher du réel
de ce qui sera sa floraison
casser
le rythme des rênes de mon corps
redorer
le dehors d’une lumière du dedans
laisser
infuser le soleil sur les routes marginales
vendredi 26 janvier 2018
Navigations /3
Enchantement \
Il y a probablement quelque chose de poétique dans l’histoire d’Eugen et c’est cet aspect qui me pousse, peut-être, à l’écrire. Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui peut être poétique dans l’histoire d’un échec, d’un malheur, d’une souffrance, d’une douleur ? Peut-être est-ce l’insouciance, le fait de regarder ce qui pourrait sembler une tragédie avec un œil détaché et enthousiasmé à la fois. Le fait de sembler éloigné des circonstances qui détruisaient systématiquement sa vie donnait à Eugen un air rêveur. Il était capable de vivre dans l’enchantement, rien ne pouvait le désenchanter. Même pas le fait qu’Alina I. ne voulait plus rien savoir de lui, même pas le fait qu’il était traqué, sans un sou, sans travail, sans aucune possibilité de se sauver. Dans un tunnel sans issue, Eugen regardait le monde et il était encore capable de se laisser émerveiller. Il regardait, plein d’admiration, les poèmes écrits sur les murs de l’appartement de Peppe, oubliant l’odeur d’humidité qui les accompagnait.
Marcello Vitali-Rosati " Navigations" Editions Publie.net
Il y a probablement quelque chose de poétique dans l’histoire d’Eugen et c’est cet aspect qui me pousse, peut-être, à l’écrire. Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui peut être poétique dans l’histoire d’un échec, d’un malheur, d’une souffrance, d’une douleur ? Peut-être est-ce l’insouciance, le fait de regarder ce qui pourrait sembler une tragédie avec un œil détaché et enthousiasmé à la fois. Le fait de sembler éloigné des circonstances qui détruisaient systématiquement sa vie donnait à Eugen un air rêveur. Il était capable de vivre dans l’enchantement, rien ne pouvait le désenchanter. Même pas le fait qu’Alina I. ne voulait plus rien savoir de lui, même pas le fait qu’il était traqué, sans un sou, sans travail, sans aucune possibilité de se sauver. Dans un tunnel sans issue, Eugen regardait le monde et il était encore capable de se laisser émerveiller. Il regardait, plein d’admiration, les poèmes écrits sur les murs de l’appartement de Peppe, oubliant l’odeur d’humidité qui les accompagnait.
Marcello Vitali-Rosati " Navigations" Editions Publie.net
jeudi 25 janvier 2018
Navigations 2
Venise \
« J’y suis, pour de vrai », pensait Eugen. Difficile de savoir comment il était sorti du commissariat, depuis combien de nuits il n’avait pas dormi, depuis combien de jours il n’avait pas mangé. Pour arriver, vraiment, il lui restait — on parle toujours à vol d’oiseau — 6 846 km. Mais, quand il descendit à Santa Lucia, ces questions lui parurent décidément secondaires. Sans perdre de temps, il suivit le flux de la foule, traversa des ponts, s’égara dans des calli pour essayer de tout voir, s’arrêta à bout de souffle sur le Canal Grande, les yeux écarquillés au passage d’une gondole — cela existait donc, ces drôles de bateaux et cette ville qui a des fleuves à la place des routes, et ces palais aux fenêtres étroites, il y était pour de vrai. Quand il me racontait son arrivée à Venise, j’étais assez perplexe. Cela m’a toujours semblé un peu trop littéraire. « Avec la police internationale qui te traquait, tu faisais le touriste à Venise ? » « Ça m’a donné une sensation de bien-être. »
Marcello Vitali-Rosati Navigations Editions Publie.net
« J’y suis, pour de vrai », pensait Eugen. Difficile de savoir comment il était sorti du commissariat, depuis combien de nuits il n’avait pas dormi, depuis combien de jours il n’avait pas mangé. Pour arriver, vraiment, il lui restait — on parle toujours à vol d’oiseau — 6 846 km. Mais, quand il descendit à Santa Lucia, ces questions lui parurent décidément secondaires. Sans perdre de temps, il suivit le flux de la foule, traversa des ponts, s’égara dans des calli pour essayer de tout voir, s’arrêta à bout de souffle sur le Canal Grande, les yeux écarquillés au passage d’une gondole — cela existait donc, ces drôles de bateaux et cette ville qui a des fleuves à la place des routes, et ces palais aux fenêtres étroites, il y était pour de vrai. Quand il me racontait son arrivée à Venise, j’étais assez perplexe. Cela m’a toujours semblé un peu trop littéraire. « Avec la police internationale qui te traquait, tu faisais le touriste à Venise ? » « Ça m’a donné une sensation de bien-être. »
Marcello Vitali-Rosati Navigations Editions Publie.net
mercredi 24 janvier 2018
Navigations 1
Flaubert \
J’ai essayé plusieurs fois de lire l’Éducation sentimentale. Sans succès. J’y trouvais quelque chose d’insupportable, de honteux. J’avais quinze ans quand j’ai essayé pour la première fois, c’était une édition italienne. Pendant un long séjour en Normandie, j’ai essayé à nouveau, en français cette fois. Mais je n’arrivai pas à aller au-delà de l’apparition de Madame Arnoux — à la page 7 de mon poche. D’autres tentatives ne donnèrent pas de meilleurs résultats. Jusqu’au moment où je l’ai lu, en entier, en deux jours. Adoré. Ce qui me semblait insupportable était devenu superbe. Un certain goût de l’échec, la banalité quotidienne de la plus totale faillite… L’acceptation du fait que tout désir est destiné à la frustration, que la vie entière sera un fiasco et — ce qui était le plus insupportable pour moi, adolescent — que, finalement, ce n’est pas très grave. Il n’y a rien d’héroïque dans la patience de l’échec le plus éclatant. Il faut avoir au moins trente ans pour apprécier Frédéric.
lundi 22 janvier 2018
Tessons/ 3
il
y a de la grisaille
dans
ce dehors
où
je ne serai pas
je
sais un peu du jour
avec
les ricochets des oiseaux
derrière
la fenêtre
qui
m’obstrue
vendredi 19 janvier 2018
Tessons/2
de l'autre côté de la fenêtre
l' envie d'un jour d'hiver
quelques pépites de ciels
aux voix paisibles
me creusent en désir
j'erre un peu en apnée
pourquoi n'irai-je jamais plus loin que le seuil
mercredi 17 janvier 2018
Tessons /1
penser
en mode écrit
à grands coups de rames
franchir des portes
à
chaque instant la lumière
abritée à l’intérieur de l’ombre
remonter l'oubli à
l'instant du silence qui respire
samedi 13 janvier 2018
Hodie, arc-en-ciel
sur
la toile d'un jour sans importance, un jour qui se serait effrité
entre les doigts sans un peu de désir, il y a un bref instant où le
regard s'arrête et se perd dans l'étroite lumière d'un jardin
suspendu. une
virgule irisée qui ponctue le ciel, un fruit éphémère qui
s’éprend d’un ciel, s’alanguit avant de s’éteindre sans
qu’on ne le sache, un simple
dessin d’enfant joyeux. rester
droit
dans cette accalmie immobile, dans la brièveté de l’instant qui
prend toute la place dans ce jour , faire
face et rêver à l’accomplissement d’une métamorphose debout
contre le vent.
jeudi 11 janvier 2018
Une très légère oscillation
Je crois à la mémoire des pierres. Elles absorbent l'écho des conversations, des pensées. Elles incorporent l'odeur des hommes. Les pierres sauvages des grottes et les pierres sages des églises rayonnent d'une force mantique. On est toujours saisi quand on pénètre sous une voûte de pierre qui a abrité les hommes.
dimanche 7 janvier 2018
avancer
on
oublie
on glisse
sur les silences
la verticale se ressaisit
on amarre les ailes de lumière
au carrefour de l'impensable
on sort et
recommence
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