J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

mercredi 24 janvier 2018

Navigations 1


       Flaubert \
J’ai essayé plusieurs fois de lire l’Éducation sentimentale. Sans succès. J’y trouvais quelque chose d’insupportable, de honteux. J’avais quinze ans quand j’ai essayé pour la première fois, c’était une édition italienne. Pendant un long séjour en Normandie, j’ai essayé à nouveau, en français cette fois. Mais je n’arrivai pas à aller au-delà de l’apparition de Madame Arnoux — à la page 7 de mon poche. D’autres tentatives ne donnèrent pas de meilleurs résultats. Jusqu’au moment où je l’ai lu, en entier, en deux jours. Adoré. Ce qui me semblait insupportable était devenu superbe. Un certain goût de l’échec, la banalité quotidienne de la plus totale faillite… L’acceptation du fait que tout désir est destiné à la frustration, que la vie entière sera un fiasco et — ce qui était le plus insupportable pour moi, adolescent — que, finalement, ce n’est pas très grave. Il n’y a rien d’héroïque dans la patience de l’échec le plus éclatant. Il faut avoir au moins trente ans pour apprécier Frédéric.

Marcello Vitali-Rosati "Navigations" Editions Publie.net

1 commentaire:

Ange-gabrielle a dit…

Comme c'est vrai ce qu'il écrit, moi je dis qu'il faut bien en avoir 60