Mardi 30 décembre 1930
Cela manque sans doute d’unité, mais je crois tout de même que c’est assez bon. (Je me parle à moi-même des Vagues au coin du feu.) Supposons que j’aie pu réunir toutes les scènes plus étroitement, surtout par le rythme, afin d’éviter ces ruptures, afin que le sang coure, d’un bout à l’autre comme un torrent. Je ne veux pas de ce gaspillage que sont les interruptions, je veux éviter les chapitres. Cela, du moins, c’est ma réussite si on peut parler de réussite. Un tout, nourri et ininterrompu, des changements de scènes, de pensées, de personnes, accomplis sans une goutte versée. Si ce pouvait être achevé avec chaleur, avec élan, c’est tout ce que cela demande encore. Et, pendant ce temps, je sens ma température qui monte. Ce qui ne m’a pas empêchée d’aller à Lewes, ni les Keynes de venir pour le thé. Et comme je me suis remise en selle, le monde retrouve ses proportions. C’est le fait d’écrire qui me donne mes proportions.
Virginia Woolf " Journal d'un écrivain" (traduction Germaine Beaumont )
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