J'avance, avec de l'ombre sur les épaules. ( André Du Bouchet)

samedi 23 juillet 2011

Saint-Marc


Nous entrions, ma mère et moi, dans le baptistère, foulant tous les deux les mosaïques marbre et de verre du pavage, ayant devant nous les larges arcades dont le temps a légèrement infléchi les surfaces évasées et roses, ce qui donne à l'église, là où il a respecté la fraîcheur de ce coloris, l'air d'être construite dans une matière douce et malléable comme la cire de géantes alvéoles; là au contraire où il a racorni la matière et où les artistes l'ont ajourée et rehaussée d'or, d'être la plus précieuse reliure, en quelque cuir de Cordoue, du colossal Evangile de Venise. Voyant que j'avais à rester longtemps devant les mosaïques qui représentent le baptême du Christ, ma mère , sentant la fraîcheur glacée qui tombait dans le baptistère, me jetait un châle sur les épaules.

Marcel Proust "Albertine disparue"

1 commentaire:

Estourelle a dit…

On ne reste jamais assez longtemps devant toutes ces choses à contempler, qu'on foule au pieds, ces détails si beaux, ces formes si "philosophiques" du mandala à la spirale au cercle, de l'arabesque à la ligne droite
ou bien lever les yeux vers les coupoles et je regrette de n'avoir pas assez foulé longtemps ce sol...

merci de le restituer par la photo!!
Et à Proust...Il faut que je le lise!!