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J'ai toujours aimé les cartes routières que l'on déplie sur une
table et sur lesquelles on trace mentalement le voyage qui va être.
Je ne suis pas Nicolas Bouvier, mais la contemplation silencieuse
d'une carte a toujours été le début du dépaysement. Sur cette
carte en relief les nervures vertes, les aplats bruns, les liserés
bleus, conjuguent la grammaire de ces paysages de dentellières. Je
déambule dans le dessin, ramasse des fragments rescapés de mes
anciennes escapades, m'installe dans la douceur de cette parenthèse,
suture (ou tout au moins essaie) le passé au présent, emplit les
creux de souvenirs argentés. J'entendrais presque les clochers de
tourmente appeler le voyageur égaré dans le brouillard.
11/
Affiner la vision et prendre langue dans la sinuosité de ces fins
traits bleus qui sillonnent en silence, murmurer leurs noms – la
Truyère, la Colagne, le Chapeauroux, la Rimeize, le Bès - ces
veines d'eau qui creusent, explorent en pleine jouissance,
traversent, révèlent l'image des ombres, coulent et font leur
chemin dans le recel des jours, s'épaississent , se séparent,
mélangent leurs voix dans un halo, abandonnent des sédiments
par-dessus le passé et s'approprient le temps. Les souvenirs
s'interpellent, ricochent puis se cachent dans les méandres des
mémoires : tout ce qui s'égare cherche un abri.
Suite des 14 fragments pour ce texte proposé à l'atelier d'écriture initié par François Bon sur son site Tiers-Livre .
Suite des 14 fragments pour ce texte proposé à l'atelier d'écriture initié par François Bon sur son site Tiers-Livre .
La consigne est en lien avec Francis Ponge
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