Il
semble regarder dans l’au-delà de la pluie , quelque chose ou
quelqu’un qui va sans doute arriver, qu’il attend peut-être mais
qui n’en finit pas de ne pas être là….Attablé dans un bar et
tourné à demi sur sa chaise en direction de la rue, alors que se
réchauffe un verre de bière sans qu’il n’y porte les lèvres,
une main posée négligemment sur la cuisse, cet homme jeune n’est
qu’attente, tandis qu’un parapluie, près de ses longues jambes,
s’égoutte avec application et commence à laisser naître ce qui
sera bientôt une flaque que le sol du café un peu sale, en cette
fin d’après-midi, laissera s’étaler sans problème. Les
sourcils se froncent, cherchent à déchiffrer derrière chaque
passant courbé sous son parapluie si , oui ou non, la personne
espérée est cachée dessous. Il consulte son téléphone portable,
soupire, avale une gorgée de bière, secoue sa jambe de pantalon qui
a absorbé un peu de l’humidité de la toile du parapluie , et
reprend sa consciencieuse attente, avec un regard fixe, presque
gonflé d’angoisse. Pour qui l’observe, un roman s’ébauche
avec options variables: oui la jeune fille ( le jeune homme) espéré
arrive enfin et ils s’étreignent avec force; non, la personne
attendue n’arrivera pas et ce personnage ( car il est désormais
devenu personnage) finira son verre, laissera sur la table quelques
euros, puis la pluie faiblissant d’intensité repartira et
disparaitra dans la ruelle. On sent confusément que sa journée n’a
plus aucun sens et que sa démarche a pris quelque chose d’indolent
et qu’une sorte de poix retient ses pas qui ont du mal à retrouver
une démarche juvénile. Sans cet orage malencontreux, l’autre
l’aurait-il rejoint ?
8 ème texte (correspondant à la proposition d'écriture de la vidéo 8) pour l'atelier d'écriture d'été animé par François Bon sur son site Tiers-Livre: " Construire une ville avec des mots".
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